Rencontre avec Paino Vanai, représentant de l’IFRECOR à Wallis-et-Futuna

Rencontre avec Paino Vanai, représentant de l’IFRECOR à Wallis-et-Futuna

Pouvez-vous vous présenter ? Et nous présenter votre engagement au sein de l’IFRECOR ? 

Je m’appelle Paino Vanai, chef du Service de l’Environnement des îles Wallis et Futuna. J’ai représenté le Territoire de Wallis et Futuna au sein du comité national de l’IFRECOR entre 1999 et 2008. Dans le cadre de cette initiative, nous avons pu faire valoir les besoins en connaissances et en protection des récifs coralliens du Territoire qui étaient jusque-là très peu étudiés, et qui subissaient de nombreuses destructions physiques, notamment liées à la pêche à la dynamite. Elle a également permis de développer la sensibilisation des autorités locales et des populations aux enjeux environnementaux globaux, très peu évoqués dans le cadre des politiques publiques.

Comment évoluent les espaces naturels de Wallis et Futuna ? Quelles sont les pressions impactant ces milieux ? 

Sur Wallis et Futuna, le suivi des récifs est réalisé depuis plusieurs années. Un nouveau réseau de suivi, mis en place en 2019, a permis de mettre en évidence des états de santé variables, allant du mauvais état à Mata’Utu, à des récifs en bonne santé à Halalo. Globalement, les récifs en état satisfaisant sont majoritaires, et semblent même être en meilleure santé qu’il y a plusieurs décennies.

Fou Brun ©Tristan Berr

La diminution des pressions, et notamment de la pression de pêche et des pratiques destructrices, peut en partie expliquer cette tendance. Il est également probable que les processus naturels récents (recrutement corallien notamment) aient été bénéfiques aux populations coralliennes.

D’autres pressions s’exercent toutefois encore sur ces écosystèmes. Ainsi, on peut noter les apports sédimentaires terrigènes via l’érosion des sols, ou en éléments nutritifs via des pollutions domestiques ou agricoles (élevages). L’extraction de matériaux coralliens et de sable est également toujours pratiquée sur Wallis et sur Futuna, causant la modification du trait de côte et du profil de certains îlots.
Le Territoire comme partout ailleurs, souffre aussi des impacts du dérèglement climatique : les phénomènes cycloniques touchent régulièrement Wallis et Futuna, et contribuent à façonner le paysage récifal. Un phénomène de blanchissement a également eu lieu en 2015 à Wallis ; l’augmentation des températures des océans pourrait accentuer ce phénomène.

Les mangroves, présentes seulement à Wallis, occupent une trentaine d’hectares. On les trouve notamment sur la côte ouest. Leurs surfaces ont fortement régressé durant les dernières décennies,  mais sont relativement stables depuis quelques années, notamment grâce aux efforts de sensibilisation du Service Territorial de l’Environnement. Plusieurs opérations de plantations de palétuviers ont également permis de restaurer cet écosystème, notamment sur le village de Utufua. Une réglementation récente classe les deux espèces de palétuviers présentes sur le territoire dans la liste des espèces protégées.
La pression la plus importante réside dans l’aménagement du territoire, puisque les mangroves ont été sujettes à des dégradations résultant de l’urbanisation du littoral. De nombreux aménagements littoraux (murs, enrochements) réalisés sur l’île d’Uvea, sans précaution particulière, ont entraîné une perturbation du transit sédimentaire côtier et une accélération des processus d’érosion. Les extractions de matériaux de plages destinés aux constructions entraînent dans certaines zones, outre la disparition de la faune et de la flore, un recul important du trait de côte.

Concernant les herbiers, seule l’île de Wallis abrite des herbiers de phanérogames marines, où trois espèces sont recensées : Syringodium isoetifolium, présente de manière dominante, ainsi qu’Halodule pinifolia et Halophila ovalis plus irrégulières. En 2006, la superficie de ces herbiers peu profonds a été estimée de manière globale avec les algueraies à 24 km². Cet écosystème a été suivi trois fois depuis 2014 ; à ce stade, il est difficile d’extraire de ces trois années de suivis des tendances d’évolution du recouvrement, étant donné les traits de vie des phanérogames marines qui composent les herbiers de Wallis, qui sont naturellement très dynamiques. Les observations in situ attestent néanmoins d’une régression sur les trois herbiers, en particulier au sein de la station de Mata’Utu. Il convient donc d’être vigilant sur la dynamique de cet herbier dont la limite basse a visiblement reculé. Les principales pressions auxquelles sont soumis les herbiers peu profonds de Wallis sont liées à la dégradation de la qualité des eaux lagonaires (enrichissement en nutriments, polluants et phénomènes d’envasement).

Quel est le regard des wallisiens sur les récifs coralliens et les écosystèmes associés (les mangroves et les herbiers) ? 

Aujourd’hui, la jeune génération, mieux informée sur les enjeux environnementaux, porte un regard différent sur les récifs coralliens et les milieux associés. Ces milieux ne représentent pas uniquement un garde-manger du quotidien, mais contribuent à un équilibre général de la nature et méritent d’être protégés. C’est le sens des actions de sensibilisation mises en œuvre notamment dans les écoles du Territoire.

En décembre 2019, vous vous-êtes vu décerner la palme IFRECOR Océan Pacifique pour le projet de restauration des mangroves. Que représente pour vous l’obtention de cette récompense ?

L’obtention de la palme IFRECOR, pour une action menée de concert avec  la Direction de l’Enseignement Catholique et qui a permis de faire bénéficier à plus de 300 enfants du primaire et des collèges d’un cycle d’apprentissage à la fois pratique et théorique sur les mangroves, est la reconnaissance du long travail de sensibilisation réalisé depuis la création du service de l’environnement du territoire de Wallis et Futuna, en 1997.

Dessin de Higano – 11 ans – Wallis

Avez-vous une anecdote de terrain à partager ou un message à faire passer ?

L’IFRECOR a permis de mener sur une longue période des actions partagées avec l’ensemble des outre-mer en faveur de la préservation des récifs coralliens et des milieux associés. Mon souhait, c’est que cette initiative puisse continuer dans cette dynamique : les récifs coralliens en ont besoin !

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